Traité de la Peinture, de Léonard de Vinci
1651
Giacomo Langlois, Paris
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La montagne qui est éloignée de l'œil se montrera d'un plus bel azur laquelle sera de soi d'une couleur plus obscure, & la plus obscure sera la plus haute & la plus couverte de bois, parce que sous les grands arbres il s'y trouve encore d'autres petits arbrisseaux, lesquels paraissent obscurs, le jour d'enhaut leur étant ôté par les plus grands: outre que les arbres sauvages des forêts sont d'eux-mêmes encore plus sombres que les domestiques; car les chênes, les fouteaux, les sapins, les cyprés, les pins & tels autres arbres champêtres sont beaucoup plus sombres que les domestiques & les oliviers; cette lueur qui se trouve interposée entre l'œil & le noir, laquelle sera plus épurée vers la haute cime, sera d'un azur plus noir & plus excellent, & de même du contraire; & une plante paraîtra moins detachée de son champ, laquelle ira confiner sur un autre champ d'une couleur plus revenante à la sienne, & de même du contraire; & d'un obiect blanc le côté qui approchera plus prés des confins du noir paraîtra plus blanc; & de même aussi ceux-là paraîtront moins blancs, lesquels seront plus 233;loignez de l'obscur, & l'endroit du noir se montrera plus obscur, lequel sera plus voisin du blanc, & semblablement il paraîtra moins obscur à proportion qu'il s'en trouvera plus éloigné.