Traité de la Peinture, de Léonard de Vinci
1651
Giacomo Langlois, Paris
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une couleur ne changera point, quoi que transportée en divers lieux de different air, quand la distance & la qualité de l'air seront reciproquement proportionnées, c'est à dire, qu'autant que l'une s'affaiblira par l'éloignement de l'œil, elle soit refortifiée par la pureté de l'air: en voici la prevue. Si on suppose que le premier air (ou le plus bas) ait quatre degrez de densité ou épaisseur, & que la couleur soit éloignée un degré de l'œil, & que le second air plus haut ait trois degrez de densité seulement, en ayant perdu un degré, redonnez à la couleur un degré sur la distance: & quand l'air plus haut aura perdu deux degrez de sa densité, & que la couleur aura gaigné deux de grez sur la distance, alors votre premiere couleur sera telle que la troisième; & pour le dire en un mot si la couleur est portée si haut que l'air y soit épuré de trois degrez de sa densité ou épaisseur, & que la couleur soit écartée à trois degrez de distance, lors vous pouvez vous asseurer que la couleur haut élèvée aura receu un pareil affaiblissement de teinte que celle d'embas qui est plus voisine, parce que si l'air d'enhaut à perdu deux quarts de la densité de l'air qui est au bas, la couleur en se haussant à acquis trois quarts sur la distance de l'éloignement entier par lequel elle se trouve reculée de l'œil: & c'est ce que nous avons dessein de prouver.